08.12.23 — 28.01.24

Corpus « Devouring Lines » de Barbara Leclercq

Territoire de programmation #In-Situ périphérique « Derrière le miroir »

Du 8 décembre 2023 au 28 janvier 2024

Nouvelles créations – 2023

46 rue Quincampoix, 75004 Paris

continuum en grès céramique émaillé, tailles variables

Barbara Leclercq est une artiste plasticienne qui vit et travaille à Bruxelles. Son parcours commença dans l’atelier dessin de La Cambre (Bruxelles, BE), puis aux Beaux-Arts d’Athènes (GR), où elle appréhendait pour la première fois le médium de la céramique. Son approche entend envisager la ruine par ses usages et imaginaires. En ce moment, en parallèle de l’atelier, Barbara réalise une recherche de fin d’étude en lien avec la faculté d’architecture Horta (Bruxelles, BE). Ce travail s’inscrit à l’intersection de sa pratique plastique et des disciplines qui la façonne. Il repose sur l’intime intention de rendre poreux différents domaines de recherches au sein de la pratique artistique. Son travail a été récompensé par le prix de la Fondation Baudouin pour la poursuite de son projet de fin d’études.

Cette année post-diplôme a été porteuse de nombreuses expositions, autant en galeries qu’en artiste run space. De récentes collaborations et résidence (Moly Sabata, Sablon, FR), ont été dernièrement un terrain fertile à de nouvelles recherches plastiques.

En 2023, le Centre accompagna le travail de Barbara Leclercq – elle fut résidente à Moly Sabata & des œuvres crées à la faveur de cette résidence furent présentées dans l’exposition Les Heures Sauvages_Nef des marges dans l’ombre des certitudes – en réamarrage du Centre.

Barbara Leclercq inaugure un nouveau territoire de programmation du vaisseau Centre nommé « Derrière le miroir ». Ses céramiques investiront un espace périphérique des espaces d’exposition assignés du Centre à savoir une vitrine située au 46 rue Quincampoix, qui devient ainsi repotentialisée et muée en espace de programmation.

Ce territoire sera investi par des œuvres produites dans le cadre de résidences de création soutenues par le Centre en Hors-Les-Murs.

Devouring Lines sont des ensembles de sculptures se greffant dans les espaces dans lesquels elles sont présentées, viennent tracer des lignes, qui du sol au plafond, élaborent une filature éreintante : manger ou être mangé.

Ces bas-reliefs en céramique s’apparentent à des scènes de dévoration. Manger l’autre, le digérer, et finalement peut-être l’incorporer. Une mue de chien enveloppe ce qui préfigure un museau, lui-même se dissolvant, parfois mordant une main, elle aussi tantôt mâchoire, tantôt support, entremêlant chien et louve, humains ou coquillages sans hiérarchie aucune. Une façon aussi de penser la vie « comme une circulation, comme un don d’une communauté d’ancêtres, et la mort comme un recyclage, un flux qui se poursuit dans une communauté écologique et ancestrale d’origines »[1].

Peut-être tout cela à la fois, comme des scénarios qui se contredisent et s’observent, se développent successivement dans l’espace ; De loin, la perception d’une carcasse animale très étirée, déchirée, puis du détail de l’architecture étrange qui constitue ses entrailles, puis de la créature qui l’a dévoré. Plus bas enfin, le même corps intact recomposé, autrement, et dévoré à nouveau quelques silhouettes plus loin ; tous ces épisodes sont considérés comme un exemple d’association d’idées. C’est compris dans la syntaxe, c’est compris dans la chair. Les lignes sont des trames narratives complexes qui se contredisent, déroulent des versions alternatives du même scénario. Elles digèrent, recrachent et recommencent l’incessant jeu de métamorphoses, dans le même mouvement insubordonné d’aucune sorte à une relation de cause à effet entre les scènes représentées. Il y a confusion dès lors qu’on essaie de distinguer celui qui dévore de celui qui porte la peau de l’autre, qui pourrait l’enfiler comme un déguisement. Entre ornements et organismes, ces sculptures anthropomorphes cherchent des syntaxes visuelles troubles, prolongeant peu à peu ce continuum qui traverse mon travail. Seule la Symbiose compte, les corps ne dessinent pas les limites ontologiques de ce qui les anime, mais des enveloppes temporaires, entrevues comme des passages et invraisemblances qui façonnent cette figure archaïque mais familière de l’homme à la peau de louve.

[1] Val Plumwood (2012)

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