L’anticipation d’un futur
Commissariat : Daniel Guionnet & Valérie Toubas fondateur.trice.s de la revue Point Contemporain en complicité avec Ariane Skoda et Stéphanie Pécourt.
Espace Vanderborght
rue de l’Ecuyer, 50 B-1000 Bruxelles
Jeudi 1er septembre 2022
Visite de presse : 10h30
Vernissage 18h30 > 21h00 + Performances # (PAS SI) FRAGILE ! 22 :
Medji Dridi, Dounia Dolbec & David Ramalho
Jeudi 22 septembre 18h00 > 23h00
Finissage & Volet sonore # IDEAL TROUBLE # Sonic Protest : Alto Fuero, Davide Tidoni, Aymeric de Tapol
Exposition
Amélie Bouvier, Claude Cattelain, Camille Dufour, Maëlle Dufour, Antoinette d’Ansembourg, Alexis Deconinck, Feipel & Bechameil, Hervé Ic, Barbara Leclercq, Margaux Lecoursonnois, mountaincutters, Nine Perris, Bertrand Planes, Julien Saudubray, David de Tscharner, Clara Thomine, Emmanuel Van der Auwera, Diego Wery
Performances # (PAS SI) FRAGILE ! 22
Antoine Pickels et Lucille Calmel, commissaires
Medji Dridi, Dounia Dolbec & David Ramalho
Medji Dridi, Dounia Dolbec & David Ramalho
Finissage & Volet sonore
Etienne Blanchot, fondateur & programmateur d’IDEAL TROUBLE
Arnaud Rivière & Franq de Quengo, co-directeurs de Sonic Protest
Alto Fuero, Davide Tidoni, Aymeric de Tapol
L’exposition L’anticipation d’un futur est en soi un HUB, un nœud de connexions par lequel les artistes mutualisent leur vision pour donner à voir au-delà d’un présent qui a tout l’air d’une fin du monde. Peut-être comme le suggérait Philip K. Dick ferions-nous sans doute mieux de prendre cette fin du monde comme point de départ pour imaginer le futur : « La planète réduite en cendres deviendrait notre prémisse ; nous l’exposerions dans le premier paragraphe avant de passer à autre chose, au lieu de la garder pour la toute fin du récit1.»
Un futur, que nous confions aux artistes, seuls aptes à ouvrir la voie, à nous exercer à désapprendre pour mieux se libérer des attendus et des normes car ils ne sont pas soumis à ce « totalitarisme fonctionnaliste2» qui régit nos sociétés et qui atteint progressivement un degré comparable à celui que décrit Aldous Huxley dans Le Meilleur des mondes ou tel que le donne à voir George Orwell dans 1984. Ils sont les seuls à pouvoir anticiper un futur tel que nous l’avons toujours rêvé.
Un futur dont leurs ateliers sont la fabrique car ils ont fait leurs les ruines de notre civilisation. Ils en recyclent tout autant les matériaux que les idées pour leur donner des formes nouvelles. En se défaisant de la gangue des logiques anciennes, en prenant acte des travers et des impasses dans lesquelles nos sociétés se sont enlisées, ils n’ont d’autre volonté que de nous proposer des alternatives à ce que les économistes, les politiques et autres prévisionnistes veulent nous contraindre. Ils ont le souci d’atteindre l’humain au plus profond de ce qu’il est, d’ouvrir par un travail sur la mémoire et par leurs réflexions, sur les situations que nous vivons, sur un futur qui n’est pas joué d’avance ou qui ne s’écrit pas comme un destin funeste.
-Le soin, ou le geste essentiel
L’anticipation n’est pas uniquement une projection, elle est la prise en main de son destin. Il s’agit tout autant d’inventer demain que de réapprendre des gestes essentiels. Créer est un acte en rapport avec le soin : porter une attention, préserver, sauvegarder, une mémoire, un environnement, l’autre. Comme un médecin peut réduire une fracture, l’acte de création est le seul à être capable d’enrayer, de réparer cette rupture grandissante avec ce qui définit la nature humaine. Rien de plus essentielles, en prise que nous sommes avec la rationalité aliénante de notre époque, que ces échappées fictionnelles ou poétiques que les artistes nous proposent, qu’ils agrémentent avec de l’inutile, du temps perdu, de l’aléa. Les artistes persistent à maintenir l’existence d’un lien, d’un espoir résistant à l’entreprise collective de démolition en amenant de la prévenance et du soin pour assurer des lendemains moins tristes.
-Éloge de la faille
Caractérisé par une part d’invention et une part de rejet, l’acte de création est un pas en avant en même temps qu’un coup de pied dans l’établi, le définitif, le conditionné. Les artistes, libérés des attendus et des normes, de la « duperie consciente3 », savent exploiter la faille et si nécessaire la créer. Ils guident nos pas hors des voies qui nous sont données à emprunter, nous incitant à rejeter toutes formes de déterminisme et de soumission aux chaînes des causes et des conséquences. Refusant de tracer une ligne droite allant de la création à la destruction et d’admettre le sempiternel retour de la catastrophe, ils intègrent d’autres perspectives, usant de la malléabilité du temps et de l’espace et de tous les moyens en leur possession pour ouvrir notre réalité à d’autres potentialités.
-La fabrique du futur
Les intuitions fulgurantes des plus jeunes, sans doute parce qu’ils ne sont pas encore aliénés au conditionnement, donnent accès à un espace-temps fait d’inconnu et de mystère. Qu’importe pour eux une Histoire qui n’est déjà plus la leur et qu’il leur faut nécessairement dépasser ! Les artistes émergents ouvrent des brèches qui mènent à un au-delà du présent, un « extra » -ordinaire, -terrestre, -conceptuel. Ils sont dans une démarche prospective qui les encourage à avancer vers l’inconnu. Ils ont déjà cette intuition, comme les visionnaires, que la poésie est mère de toutes les sciences, qu’elle seule peut ouvrir des pistes de recherche valables pour penser le monde futur. L’entrée dans leur atelier fait du visiteur un explorateur qui peut entrapercevoir les prémisses d’une civilisation nouvelle, entrer en contact avec des formes que les plus éclairés des scientifiques n’ont pu présager.
Quoi de plus galvanisant que de traquer dans les empilements épars, les expérimentations apparemment sans lien logique, une succession de signes énigmatiques qui ne peuvent être que la clef d’un futur dont on ignore encore tout ?
Daniel Guionnet & Valérie Toubas, Commissaires et fondateur.trice.s de la revue Point Contemporain